LE FESTIN DE PIERRE
Oeuvre
Sources
Brenner, A bibliographical list of plays in the French language, 1700-1789, New-York, AMS Press, 1979.
Représentation(s)
AD Gard, JR356/1, Le Journal du Gard, 8 Juin 1811, n°332
« Cette troupe nous annonce un répertoire plus étendu que ne l’est ordinairement celui des troupes d’opéra ; le sien s’étend jusqu’à la haute comédie. On sait combien le goût en ce genre est relâché depuis plusieurs années : il a dégénéré à Paris ; il est presque entièrement perdu en province. Il n’y a plus d’acteurs pour jouer la comédie plus de spectateurs pour l’écouter : le petit nombre de sujets qui peuvent rester encore est éparpillé dans des troupes chantantes, où ils ont été obligés de s’enrôler et de se faire chanteurs, pour avoir de l’emploi, et où ils achèvent de perdre leur talent ; le petit nombre d’habitués du théâtre, amateurs de la comédie, diminue tous les jours par des raisons bien sensibles. Il n’est donc pas étonnant que l’on n’ait pas lieu d’être satisfait de ce genre, toutes les fois qu’on le reproduit sans les moyens de le faire valoir. On nous a donné dernièrement trois grandes comédies, La femme Jalouse, Le Festin de Pierre et Le Barbier de Séville. Quelques scènes ont fait plaisirs ; celles-ci où figuraient ceux de nos acteurs, en très petit nombre, qui sont propres à cet emploi ; tout le reste n’a rien valu, et nous nous dispenserons d’entrer dans les détails à ce sujet. Il est cependant un vice commun à tous, que nous ne passerons pas sous silence, c’est la manière dont ils décomposent les vers : ils en font de neuf, de onze, de treize, de quatorze et de quinze pieds. Cela choque d’autant plus, que lorsque le spectateur attentif n’a guère à espérer du talent du comédien, il veut du moins, pour se dédommager, jouir du talent du poëte. Il nous paraît bien étonnant que des artistes d’opéra, par conséquent musiciens et accoutumés à marquer la mesure des sons, soient si dépourvus d’oreille quand il s’agit d’observer la mesure des vers. La cadence en musique et le rythme en poésie sont du ressort du même organe, et un musicien devrait moins que tout autre être exempt de ces barbarismes poétiques. On pourrait, ce semble, en conclure avec des raisons que ceux qui font pareilles fautes sans que leur oreille en soit choquée, ne sont pas organisés pour être musiciens, et que leur talent en ce genre est bien moins l’ouvrage de la nature que l’effet du travail et de l’habitude. Quoiqu’il en soit, nous ne saurions trop recommander à tous nos acteurs de bien étudier leurs rôles, surtout lorsqu’ils sont écrits en vers, afin qu’ils puissent les débiter littéralement ; afin que si l’on est souvent privé de ce qui sert à marquer l’intention de l’auteir, on puisse du moins jouir de son style. »
AD Gard, JR356/1, Le Journal du Gard, 8 Juin 1811, n°332